L'exposition

L'ouverture

Pour rappel, nous avons vu dans l’introduction que pour gérer l’exposition d’une image, un appareil de prise de vue peut jouer sur 3 paramètres :

  • Le temps de pose.
  • L’ouverture
  • La sensibilité.

Dans cet article, nous allons nous intéresser à l’ouverture.

S’il ne fallait retenir que cela :

Les appareils de prise de vue sont dotés d’un dispositif mécanique qui peut s’ouvrir ou se fermer pour laisser passer plus ou moins de lumière : le diaphragme. Son ouverture est désignée par les caractères « f/ » suivis d’un chiffre. Plus ce chiffre sera faible, plus l’ouverture du diaphragme sera grande. A l’inverse, une valeur f/ élevée caractérise une faible ouverture.

Explications :

Dans l’article d’introduction à l’exposition, je prenais l’exemple de nos yeux qui ont la capacité à s’adapter à la lumière ambiante. Pour cela, notre pupille se dilate ou se contracte en fonction de la luminosité. Nos appareils de prise de vue reproduisent cette « technique » à l’aide d’un dispositif mécanique (le diaphragme) inséré dans l’objectif. Celui-ci forme un cercle dont le diamètre peut augmenter ou diminuer, laissant passer plus ou moins de lumière… tout comme notre pupille. Si on reprend l’analogie avec un récipient que l’on remplit d’eau, le diaphragme représente le robinet que l’on tourne plus ou moins pour moduler le débit.

Pour connaitre l’ouverture du diaphragme, on utilise un chiffre, souvent précédé de « f/ » ou de « 1 : » (mais pas systématiquement). Nous reviendrons un peu plus loin sur l’importance de ce symbole.

On pourrait s’attendre à ce que ce chiffre augmente proportionnellement avec l’ouverture (donc la quantité de lumière). Il serait logique qu’en faisant varier l’ouverture de 4 à 8, on double la quantité de lumière passant dans l’objectif … mais ce serait beaucoup trop simple. En passant de f/4 à f/8, nous allons en réalité diviser par 4 la lumière reçue par le capteur. C’est totalement contre-intuitif, mais voyons pourquoi. Pour cela, il est nécessaire de faire un peu de maths (comme souvent en photo). Rassurez-vous, cela reste assez basique.

  • Rappelez-vous le symbole « f/ » évoqué quelques lignes plus haut. « f » désigne la longueur focale de l’objectif et « / » désigne une division. Une ouverture de f/4 signifie : le diamètre d’ouverture de mon diaphragme est égal à la longueur focale de mon objectif divisée par 4. Si j’utilise un objectif de focale 24 mm, f/4 me donnera un diamètre d’ouverture de 24 / 4 = 6 mm. Si je passe maintenant à f/8 avec le même objectif, le diamètre d’ouverture sera de 24 / 8 = 3 mm… soit 2 fois plus petit. En passant de f/4 à f/8, on a divisé par 2 le diamètre d’ouverture. La valeur de f/ et le diamètre d’ouverture varient donc en sens opposé. On devra donc :
    • Augmenter la valeur de f/ pour réduire l’ouverture (et laisser passer moins de lumière)
    • Diminuer la valeur f/ pour augmenter l’ouverture (et laisser passer plus de lumière)
  • La quantité de lumière reçue par le capteur est fonction de la surface du cercle décrit par le diaphragme. Si l’on double sa surface, on double la quantité de lumière le traversant… c’est logique. Or, nous avons appris à l’école la formule suivante pour calculer la surface S d’un cercle de diamètre d : (1/4) x pi x d². La surface varie donc en fonction du carré du diamètre. En reprenant l’exemple ci-dessus et en remplaçant pi par sa valeur approximative de 3,14, on obtient :
    • Ouverture à f/4 : diamètre = 6 mm donc surface = (1/4) x 3,14 x 6² = 28 mm²
    • Ouverture à f/8 : diamètre = 3 mm donc surface = (1/4) x 3,14 x 3² = 7 mm²… soit 4 fois moins qu’à f/4.

Exemple de photos à différentes expositions :

La série ci-dessous montre 4 photos (même principe que l’article sur le temps de pose) :

  • La première a été prise en mode automatique en laissant l’appareil choisir le temps de pose adapté. On voit que l’image est correctement exposée.
  • Sur la deuxième, tous les paramètres ont été laissés à l’identique, sauf la surface d’ouverture qui a été divisé par 2. La photo est donc beaucoup plus sombre car la quantité de lumière reçue a bien évidemment été divisée par 2. Comme vous le savez maintenant, elle est sous exposée de 1 EV. Vous noterez que j’ai parlé de surface d’ouverture, pas de diamètre. Pour diviser la surface par 2, il faut diviser le diamètre par la racine carrée de 2 (soit 1.414). C’est ce qui se passe entre 6.3 et 4.5.
  • Les 2 images suivantes sont la suite logique des premières, la surface d’ouverture étant à chaque fois divisée par 2. L’image s’assombrit encore, au point que certaines zones sombres sont devenues totalement noires. La dernière est sous-exposée de 3 EV (23 = 2 x 2 x 2 = 8)

Cette deuxième série est l’inverse de la première. On retrouve notre photo de base correctement exposée, puis chaque image correspond à une surface d’ouverture multipliée par 2. L’image s’éclaircit progressivement et les zones les plus lumineuses (en particulier le ciel) deviennent blanches.

On a ici augmenté l’exposition d’une diaph, puis 2 puis 3.

On voit donc clairement l’impact de l’ouverture sur la lumière reçue par le capteur et sur l’exposition de la photo.

Comment est géré le temps d'exposition : le diaphragme

Nous avons vu que la diamètre d’ouverture est géré par le diaphragme. Celui-ci se situe dans l’objectif et se compose d’un ensemble de lamelles articulées décrivant un cercle. Lorsqu’elles pivotent autour d’un point, le diamètre de ce cercle augmente ou diminue laissant passer plus ou moins de lumière.

Cliquez sur l’image ci-dessous pour voir l’animation.

Les plages d'ouverture

Lorsque l’on choisit un objectif, la 2° caractéristique à prendre en compte (après la longueur focale) est son ouverture maxi. En effet, une grande ouverture (donc une petite valeur de f/) permettra de faire passer plus de lumière, rendant notre appareil plus performant dans les conditions sombres. Cette valeur est toujours indiquée sur la face avant de l’objectif. Voici à titre d’information les valeurs usuelles de f/ :

  • Pour des focales courtes (inférieures à 50 mm), un objectif bas de gamme a une ouverture maxi autour de f/3.5. Les meilleurs atteindront f1.8 ou f/1.4… voire même pour les plus rares des valeurs inférieures à 1. Il faut néanmoins savoir que ces grandes ouvertures sont complexes à obtenir et que l’encombrement, le poids et le prix de l’objectif augmentera en conséquence.
  • Pour les focales plus longues, un bas de gamme proposera une ouverture maxi à 6.3 et les meilleurs atteindront 4 voire 2.8. Là aussi une grande ouverture rendra l’objectif plus complexe.

La valeur d’ouverture mini n’est pas intéressante car on l’utilise assez peu. Elle se situera en règle générale entre f/20 et f/40 selon la focale et la qualité de l’objectif.

Les images ci-dessus montrent un zoom Canon de focale 55 – 250 mm. Le sigle 1 : 4 – 5.6 indique que l’ouverture maxi à 50 mm est de f/4 et qu’elle est de f/5.6 à 250 mm

Les limites du mode automatique : la profondeur de champ

L’ouverture étant un paramètre plus complexe à comprendre que le temps de pose, il est tentant de laisser notre appareil la gérer automatiquement pour s’adapter à la lumière ambiante… ce qu’il est tout à fait capable de faire. Mais s’il peut mesurer finement la lumière, il ne sait pas (encore ?) comprendre le contexte de la prise de vue. Ceci peut donc mener à des mauvais choix.

Le réglage de l’ouverture aura une incidence sur la profondeur de champ. Pour expliquer cette notion, je vais à nouveau faire une analogie avec l’œil humain. Lorsque nous lisons un livre (ou cet article sur notre écran), nos yeux s’adaptent pour que les caractères soient nets. Si à ce moment nous levons la tête pour regarder au loin, les objets nous apparaitront flous pendant quelques dixièmes de secondes. Puis, nos yeux vont s’adapter et nous les verront alors nets. Si nous retournons à notre livre ou à notre écran, nos yeux auront à nouveau besoin de quelques instants pour s’adapter à la vision de près. En photo ou en vidéo, cette opération s’appelle la mise au point. L’appareil va choisir (seul ou sous les ordres du photographe) la zone de l’image qui sera nette. Si la zone cible se situe à 20 m de l’objectif, tous les objets situés à 20 m de nous seront nets. Ceux qui sont plus en avant ou plus en arrière seront flous, dans des proportions plus ou moins importantes. La distance sur laquelle les objets apparaitront nets se nomme la profondeur de champ. Prenons 2 exemples et voyons l’influence de l’ouverture :

  • Lorsque l’on fait le portrait d’une personne, on fait la mise au point sur ses yeux et on cherche à ce que l’arrière-plan soit flou. Ceci mettra en valeur le visage car en regardant la photo, l’œil ne trouvera aucun autre détail sur lequel s’arrêter. On cherche donc une faible profondeur de champ. Pour l’obtenir, on choisira une grande ouverture (donc une petite valeur de f/).
  • Dans le cas d’une photo de paysage, on cherchera au contraire à avoir la plus grande partie de la scène nette. L’arrière-plan bien entendu mais également les plans intermédiaires et selon les cas le 1° plan. Nous souhaitons ici obtenir une grande profondeur de champ, ce qui sera possible en utilisant une petite ouverture (grande valeur de f/).

La série de photos suivante illustre l’influence de l’ouverture sur la profondeur de champ. J’étais sur une place près de chez moi avec des plantes à proximité lorsque j’ai vu passer cette montgolfière. Certes, mon zoom de 70 mm est très insuffisant pour mettre cette dernière en valeur. Mais la mise au point sur un objet lointain illustre bien l’influence de l’ouverture sur la profondeur de champ.

La 1° photo a été prise à l’ouverture mini de mon objectif, à savoir f/36. La montgolfière est nette, tout comme les plantes au 1° plan de la photo (dans l’angle inférieur gauche).

Sur les photos suivantes, j’ai augmenté progressivement l’ouverture. Plus celle-ci est importante, plus le 1° plan devient flou. J’ai dû arrêter l’expérience à f/8 car poussée par le vent, la montgolfière a disparu derrière le toit de la maison. Si j’avais augmenté l’ouverture jusqu’au maxi admissible par mon objectif (f/6.3), les plantes seraient devenues difficilement perceptibles en raison du flou. On voit donc clairement que l’augmentation de l’ouverture entraîne une diminution de la profondeur de champ.

J’ai utilisé des valeurs extrêmes (en particulier le f/36) pour le besoin de cet article. Mais dans la pratique, il est déconseillé de réduire l’ouverture au-delà de f/18 ou f/20 car certains phénomènes de diffraction peuvent apparaître et déformer l’image. De même, il est déconseillé d’utiliser l’ouverture maxi dans des conditions usuelles afin de préserver la qualité de l’image. Néanmoins, cela peut s’avérer très utile dans les situations de lumière difficiles. Il vaut parfois mieux une « mauvaise » photo que pas de photo du tout.

Sortir du mode automatique : le mode priorité ouverture.

Comment faire pour s’assurer que le réglage d’ouverture soir adapté à la situation ? Il suffit simplement de l’expliquer (gentiment) à notre appareil. Nous avons 2 possibilités à notre disposition :

  • Le mode portrait ou paysage. La plupart des appareils photo disposent de modes « scène« . Ils permettent à l’utilisateur d’indiquer le type de photo qu’il souhaite réaliser : un portrait, un paysage, un feu d’artifice, une scène d’action… L’appareil appliquera alors un jeu de paramètres prédéfinis par ses concepteurs et adapté au type de situation choisie. En mode « Portrait », il choisira une grande ouverture afin de privilégier le flou d’arrière-plan. En mode « Paysage », il sélectionnera une ouverture intermédiaire (autour de f/8) afin de favoriser la profondeur de champ.
  • Mode priorité ouverture

    Mode A : priorité ouverture

    Pour les plus aventureux, le mode Priorité Ouverture. Il s’agit d’un des 2 modes semi-automatiques dont sont dotés la plupart des appareils dits « experts ». Comme son nom l’indique, il permettra à l’utilisateur de fixer l’ouverture qu’il souhaite utiliser dans une situation donnée. L’appareil adaptera automatiquement les autres paramètres pour maintenir une exposition correcte (pour plus de détails, voir l’article sur le « triangle d’exposition »). Selon les marques, ce mode peut se nommer A (comme Aperture en Anglais) ou Av.

Ouvertures indicatives en fonction de la situation :

  • Ouverture maxi (variable, en général entre f/0.9 et f/3.5 pour les objectifs les plus usuels) : situations de faible luminosité
  • 1 à 2 diaph en dessous de l’ouverture maxi : portrait ou situation nécessitant un flou d’arrière plan
  • Autour de f/8 : ouverture « passe partout », adaptée à la plupart des situations car offre un bon compromis profondeur de champ / qualité optique
  • f/14 à f/18 : situations nécessitant une profondeur de champ extrême, comme par exemple un paysage avec un 1° plan proche de l’objectif

Nous comprenons maintenant l’intérêt qu’il y a à faire varier l’ouverture. Elle nous permet en particulier d’adapter la profondeur de champ à l’histoire que nous souhaitons raconter avec chacune de nos prises de vue. .

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